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Invariant n°17 de Célestin Freinet

L’enfant ne se fatigue pas à faire un travail qui est dans la ligne de sa vie, qui lui est pour ainsi dire fonctionnel.

Ce qui fatigue, les enfants comme les adultes, c’est l’effort contre nature, qu’on fait parce qu’on y est contraint.

La scolastique est si bien habituée à ses erreurs qu’il est admis officiellement que le jeune enfant ne peut pas travailler plus de quarante minutes et qu’il faut après dans toutes les classes 10 minutes de récréation. Or, nous constatons expérimentalement – et cette constatation ne souffre que fort peu d’exceptions – que cette règle scolastique est fausse : lorsqu’il est occupé à un travail vivant qui répond à ses besoins, l’enfant ne se fatigue absolument pas et il peut s’y appliquer pendant deux ou trois heures, davantage même si n’intervenaient les besoins physiques naturels.

À l’Ecole Freinet, les enfants travaillent sans interruption de 8 h 30 à 11 h 30, et très normalement. La fatigue des enfants est le test qui permet de déceler la qualité d’une pédagogie.

Test :

L’enfant peut travailler plusieurs heures sans fatigue. VERT

L’enfant se fatigue parfois, ce qui nécessite détente et repos. ORANGE

On est obligé de pratiquer les récréations. ROUGE

 

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Balise 24

Prenez en considération la fatigue numérique du groupe classe

Fatigue et efforts contre nature

Selon cet invariant n°17 de Célestin Freinet, la fatigue est interdépendante de la nature du travail entrepris par l’élève. Dans le cadre d’un travail imposé dont il ne perçoit pas le sens, l’enfant effectue un effort contre nature qui va générer une fatigue importante.

Au contraire, s’il exécute un travail vivant qui répond à ses besoins, le même enfant est capable d’exécuter ce travail et de s’appliquer pendant plusieurs heures. Donc, ce sont bien les caractéristiques du travail qui conditionnent la capacité physique de l’élève à pouvoir l’effectuer. Freinet avance dès lors que la fatigue est un bon test pour déceler la qualité du travail pédagogique demandé : des élèves fatigués sont des élèves auxquels le travail proposé ne répond pas à leurs besoins ou attentes. Or cette question des besoins des élèves dans le domaine du numérique est intimement liée à la démultiplication de leurs usages du numérique dans la sphère extra-scolaire. En ce sens, il n’est pas illusoire de penser qu’un réel besoin de l’élève serait de vivre une expérience scolaire déconnectée ou à tout le moins focalisée sur un usage précis, à rebours de pratiques privées multidirectionnelles, parfois superficielles. En ce sens, nous rejoignons le constat formulé par Barrère : « L’institution scolaire en particulier, se voit interrogée dans ses postulats de déconnexion et de monoactivité des apprentissages, par les temporalités rapides et les cumuls d’activité désormais familiers aux adolescents. »(Barrère, 2015).

Fatigue récréative

À l’époque actuelle, la relation entre le numérique et la fatigue s’envisage prioritairement sur l’idée qu’une exposition prolongée aux écrans dans la sphère privée peut générer une fatigue résiduelle susceptible d’impacter les performances des élèves en classe. Soyons clairs, cet élève fatigué en classe par une nuit passée à jouer à des jeux vidéo existe bien. Et nul doute que les performances scolaires de cet élève s’en ressentent. Ceci dit, par le biais de cet invariant, Freinet invite à problématiser la fatigue dans son rapport au travail scolaire, c’est-à-dire l’activité concrète de l’élève en classe. Par conséquent, dans le domaine du numérique, il nous semble opportun de questionner également la relation éventuelle entre la fatigue et la dimension numérique de certaines tâches exigées en classe.

L’euphorie des outils

Rappelons d’abord que, comme nous l’avons vu dans d’autres balises, le numérique est bien en capacité de moderniser certains supports employés dans le cadre de pédagogies très transmisses ou magistrales qui reposent principalement sur l’écoute d’un discours enseignant.

Dans ce cadre, il est fort probable que l’effet de nouveauté du numérique stimule temporairement certains apprenants, mais, si l’on suit la logique de Freinet, l’euphorie sera de courte durée puisque la nature du travail n’a pas changé. Pour Freinet, c’est bien le sens que l’élève donne aux apprentissages qui lui donne du cœur à la tâche. La modernité des supports utilisés ne suffit pas, c ‘est bien le côté vivant du travail qui donne envie à l’élève de s’appliquer.

Des projets numériques très exigeants

Si l’on envisage maintenant la conduite de projets numériques pérennes comme l’élaboration d’un blog de classe, on constate que cette dimension fatigue est sans doute à prendre en considération compte tenu de l’ampleur des tâches exigées et du temps de travail nécessaire.

Même quand ils sont élaborés selon des modalités Freinet, ces projets numériques présentent un certain nombre de caractéristiques susceptibles de générer une grande fatigue de la part du groupe classe : difficulté à articuler toutes les tâches demandées, planning de publications éventuelles, difficultés techniques lors des mises à jour, répétitions de certaines tâches, etc.

Pour ces projets, les besoins physiques naturels évoqués par Freinet sont sérieusement à prendre en considération même si le travail, en tant que tel, répond au travail motivé et vivant décrit par Freinet.

La fatigue du distanciel

La période du confinement plaide également pour une prise en compte de la relation entre le numérique et une fatigue de travail à distance. Certaines interviews menées dans le cadre de la recherche font distinctement apparaître la fatigue pressentie comme un effet (parmi beaucoup d’autres) de cet enseignement par écrans. Notamment parce que le temps d’écran de ces enseignants a été surmultiplié. Mais aussi et surtout parce que ces modalités de travail ont profondément modifié le travail lui-même, le rendant moins stimulant, moins vivant, pour les élèves comme pour eux.

Conclusion

Dans le cadre de l’approche Freinet du numérique, l’enseignant doit veiller à ne pas attribuer hâtivement la responsabilité de la fatigue des élèves à des usages numériques récréatifs réalisés en dehors de l’école. La nature et l’organisation du travail exigé, numérique on non, reste l’étalon réel de cette fatigue selon l’approche. Toutefois, comme nous l’avons vu, certains projets numériques gourmands en termes de temps et de ressources méritent une attention singulière, car leur mise œuvre, même dans un cadre Freinet, génère une fatigue très importante pour le groupe classe dans son ensemble.

Pour aller plus loin

L’article proposé ci-dessous se penche sur l’assiduité numérique des adolescents au départ de leur discours. L’occasion de percevoir le large éventail d’usages numériques de ces ados – élèves et de questionner le rôle de l’école face à cette disparité.

Barrère, A. (2015). Face aux loisirs numériques des adolescents : L’école et la famille à l’épreuve. Les Sciences de l’éducation – Pour l’Ère nouvelle, 48(1), 127‑147. https://doi.org/10.3917/lsdle.481.0127

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