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Invariant N°8 de Célestin Freinet

Nul n’aime tourner à vide, agir en robot, c’est-à-dire faire des actes, se plier à des pensées qui sont inscrites dans des mécaniques auxquelles il ne participe pas.

Qu’un enfant tourne les pédales d’un vélo sur cale, il s’en lassera vite, alors qu’il ira au bout du monde sur son vélo qui roule pour du bon.

Nous verrons, dans les chapitres suivants, où peut nous mener le feu vert qui nous ouvre la voie vers le travail vivant et l’action.

Nous aurions là à faire le procès de tous les exercices scolaires qui fonctionnent sur cale, pour rien ou en tous cas pour des buts qui ne sont pas les nôtres.

Feu rouge pour les exercices divers qui n’ont d’autre but que de se couvrir éventuellement d’encre rouge. Feu rouge pour l’étude mécanique et par cœur de textes ou de récitations qu’on ne comprend pas.

Feu rouge pour les devoirs de rédaction dont le seul lecteur sera le maître et qui ne répondent à aucun des impératifs naturels d’expression et de communication.

Mais nous aurons la plupart du temps à envisager des feux orange et des clignotants.

Dans les conditions actuelles de travail scolaire, il sera pendant longtemps difficile de substituer au travail scolastique les activités motivées qui sont la raison d’être de notre pédagogie.

On sera alors obligé de s’accommoder bien souvent de ce qui est, de l’adapter au mieux à nos techniques, et de créer, dans cet ensemble condamné des éléments de liberté et de progrès.
Un des éléments auquel, contrairement à ce que prétendent les psychologues, nous ne donnerons pas le feu vert mais un simple orange et clignotant, c’est le jeu, qui n’est pas une activité naturelle mais seulement un ersatz du travail.

Test :
Valable toute activité qui a sa raison d’être dans le comportement
de l’individu dans son milieu. [vert]
Activités qui donnent parfois une illusion de liberté et de motivation, mais qui n’en sont pas moins des ersatz.
Devoirs scolastiques imposés.

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Construisez du sens autour de la pratique numérique

L’élève robot

Dans son invariant 8, Célestin Freinet regrette que l’école traditionnelle développe une forme de robotisation des élèves via l’usage quasi mécanique d’activités essentiellement basées sur la mémorisation et la restitution de savoirs. Une composante importante de la proposition pédagogique de Freinet est de construire davantage de sens pédagogique en se basant sur des activités motivées par les conditions de la vie réelle. Pour le dire autrement, l’idée de Freinet est de faire vivre à l’école des situations d’apprentissage qui ont du sens aux yeux des élèves parce qu’elles sont susceptibles d’exister ou de se reproduire en dehors de la classe. Dans le cadre d’une approche Freinet du numérique, il convient donc de questionner le sens des usages du numérique en classe et de vérifier dans quelle mesure ces usages dialoguent avec l’école robotique décriée par Freinet.

Le numérique et les méthodes traditionnelles

Le numérique comme levier de modernisation des méthodes classiques est une composante du discours entourant le numérique scolaire et un argument important pour justifier l’intégration des outils TICE dans les classes. Mais, dans le cadre de notre approche, il nous semble fondamental d’inviter l’enseignant à identifier le foyer réel de cette modernisation et d’adopter un esprit critique à l’égard de ce discours de modernité entourant le numérique.

Si l’enseignant recourt à une stratégie d’enseignement très explicative, le fait que les supports appuyant ce cours magistral soient diffusés numériquement sur un tableau interactif ou consultables à distance par les élèves sur tablettes numériques ne modifie pas en profondeur la teneur magistrale du cours dispensé et le fait que l’élève ait peu d’opportunités pour interagir avec les apprentissages. De la même manière, un drill numérisé utilisé à outrance s’apparente à ce que Freinet désigne comme « des exercices scolaires qui fonctionnent sur cale » c’est-à-dire des exercices très décontextualisés et peu en relation avec un besoin construit par l’élève au départ d’une expérience réelle.

A contrario, si le TBI vient offrir des opportunités nouvelles de compréhension de l’abstrait pour certains élèves qui ont démontré des difficultés de maîtrise au départ d’une expérience menée en classe ou si l’enseignant, pour la première fois, grâce au numérique, ouvre des itinéraires de différenciation via des exercices réalisables en classe ou à domicile via des supports numériques, alors l’intégration des outils en classe a plus concrètement mené à une forme de modernisation pédagogique. Le numérique fait donc sens dans une approche Freinet quand les pratiques mises en œuvre s’inscrivent dans cette volonté de détourner la classe d’apprentissages focalisés sur une logique d’écoute – mémorisation – restitution. En ce sens, la numérisation des supports n’est aucunement garante d’une modernité pédagogique au sens Freinet du terme et, à ce titre, le confinement nous semble avoir été une forme de laboratoire du hiatus entre modernité pédagogique et numérisation des supports d’enseignement.

Le numérique et le confinement : raison d’être et repli pédagogique

L’usage du numérique en période de confinement a démontré la capacité des outils à permettre une certaine continuité pédagogique (Boudokhane-Lima, F., Felio, C., Lheureux, F., & Kubiszewski, V. (2021) via des apprentissages à distance dont l’efficacité est encore à débattre, compte tenu du peu de recul actuel dont la communauté scientifique dispose. Ceci étant dit, au niveau des écoles Freinet, plusieurs interviews d’enseignants du champ réalisées dans le cadre de notre recherche ont fait apparaître très distinctement le ressenti d’une forme de repli pédagogique pendant cette période. Si chaque enseignant s’est adapté à la situation via des stratégies diverses reposant sur l’usage de plusieurs artefacts numériques (réseaux sociaux, plateformes collaboratives, etc.), tous signalent une forme d’incapacité à faire perdurer la dynamique Freinet de leur classe via les outils d’enseignement à distance. Pour certains, cette période s’est précisément vécue comme un retour temporaire aux méthodes traditionnelles et à un usage plus conséquent de l’enseignement magistral. Dans ce cas de figure exceptionnel, le recours massif au numérique s’est donc traduit, pour ces acteurs Freinet, par le vécu d’une régression pédagogique en regard de leurs pratiques de classe en présentiel. De facto, si le numérique a fait ses preuves, pendant ces conditions (actuelles) de travail pour permettre la continuité des enseignements, rien ne démontre, à ce stade, qu’il est susceptible de développer une approche Freinet des apprentissages en modalité d’enseignement à distance. A bien des égards, cette période a structuré une nouvelle forme d’ensemble condamné pour le champ Freinet même si, comme nous l’avons documenté pour les besoins de notre recherche, diverses activités envisagées par les enseignants ont assurément ouvert certains espaces de liberté et de progrès pour leurs élèves.

Le numérique et l’approche Freinet

Dans le cadre de notre approche, le numérique doit trouver sa raison d’être en classe dans sa capacité à ouvrir ces espaces de liberté dont parle Freinet, c’est-à-dire des activités qui font sens aux yeux des élèves parce qu’elles interagissent avec leur réel, leur vécu, leurs envies et besoins. Compte tenu de la numérisation croissante de l’environnement des élèves et vu l’intensification des usages domestiques du numérique, nul doute qu’une large gamme de pratiques permettent d’établir ce pont entre la classe et le monde. Ceci dit, cela implique, pour l’enseignant qui voudrait s’inscrire dans notre approche, le fait de ne pas uniquement utiliser le numérique pour opérer « un ravalement de façade » d’une pédagogie traditionnelle mais plutôt d’envisager le numérique comme le levier potentiel d’une dynamique Freinet d’apprentissage.

Pour aller plus loin

L’article présenté dans la bibliographie est accessible en ligne et il propose le résultat d’une large étude portant sur le regard des enseignants quant à l’usage des outils numériques pendant le confinement. Suite à la lecture, on distingue certaines influences de l’usage du numérique sur les méthodes d’apprentissage des enseignants et, de manière plus générale, les conclusions nuancent l’idée selon laquelle les expérimentations menées débouchent automatiquement sur une meilleure prise en considération et maîtrise du numérique par le corps enseignant.

Boudokhane-Lima, F., Felio, C., Lheureux, F., & Kubiszewski, V. (2021). L’enseignement à distance durant la crise sanitaire de la Covid-19 : Le faire face des enseignants en période de confinement. Revue française des sciences de l’information et de la communication, 22, Article 22. https://doi.org/10.4000/rfsic.11109

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